Elle l’a fait. En solitaire. Sur un bateau de 6,50 mètres.

Ce samedi 28 juin à 19h14 UTC, Alice Valiergue a coupé la ligne d’arrivée de son tour des îles britanniques en solitaire, sans escale ni assistance, à bord de Vitamine, son Mini 6.50 de série. Après plusieurs semaines en mer, elle entre dans un cercle très fermé : celui des marins qui ont réussi à dompter ce parcours redoutable… sur un bateau aussi petit qu’exigeant.

Un exploit ? Plus que ça. Une leçon de ténacité et de courage.

Un parcours légendaire autour des îles britanniques

Le défi qu’Alice Valiergue vient de boucler n’est pas un simple tour de l’Angleterre.

Le parcours qu’elle a suivi, défini par la règle 26.1.c du WSSRC, impose un contour rigoureux de l’ensemble des îles Britanniques et Irlandaises, en passant au large de plusieurs caps et îles mythiques. Quelle que soit la direction choisie, le trajet doit obligatoirement contourner : les îles Scilly, le Fastnet Rock, les impressionnantes îles Skellig, l’îlot de Tearaght, l’archipel isolé de St Kilda, le roc de Sula Sgeir, et enfin Muckle Flugga, à l’extrême nord des Shetlands.

Les lignes de départ et d’arrivée homologuées sont au choix entre Lizard Point, Ventnor ou Ramsgate.

Alice a franchi la ligne au large de Lizard, extrémité sud-ouest de l’Angleterre, là où la mer Celtique vient croiser la Manche. Un point de départ symbolique, mais aussi stratégique pour gérer les premières dépressions atlantiques.

Ce parcours représente environ 2 000 milles nautiques (près de 3 700 km) dans des zones de navigation très variées : côtes battues par l’Atlantique, détroits à forts courants, passages encombrés par les cargos, champs d’éoliennes, plateformes pétrolières, et changements météorologiques brutaux.

Un véritable marathon océanique, sans escale ni assistance, dans des mers parmi les plus complexes d’Europe.

Un défi surdimensionné pour un si petit bateau

Partir seule pour un tour complet du Royaume-Uni en Mini 6.50, c’est s’attaquer à une montagne avec des baskets de trail. Ces bateaux, conçus pour des traversées express de l’Atlantique dans un cadre de course très balisé, ne sont pas pensés pour affronter les pièges d’un parcours côtier long de près de 2 000 milles, exposé à toutes les météos de l’Atlantique Nord.

Entre les mers hachées de la mer d’Irlande, l’hostilité des Shetlands, les cargos du Channel et les vents capricieux de la façade est, chaque mille a été un combat. Dans une cellule de vie grande comme une tente de bivouac, sans pilote de secours, sans météo fiable à certains moments, Alice a dû tout faire seule : barrer, manœuvrer, réparer, décider.

La mer n’a rien lâché. Elle non plus.

Dès les premiers jours, la météo a montré les dents : à l’ouest de l’Irlande, Alice a rencontré des grains violents avec des rafales à plus de 40 nœuds, dans une mer courte et épuisante. Mais ce n’était que le début. Le long du parcours, elle a dû slalomer entre les plateformes pétrolières écossaises, croiser dans des zones denses en cargos, et traverser d’immenses champs d’éoliennes en mer, souvent dans des conditions de visibilité réduite et sous des grains réguliers à plus de 35 nœuds. Une navigation tendue, sans répit.

Mais la navigatrice n’a jamais renoncé.

« Il a fallu aller la chercher, cette ligne d’arrivée », confiait Julien Hatin, qui était en contact avec elle une fois par jour pour lui transmettre les indications météo par SMS, via une balise de positionnement GPS.

Son Mini Vitamine, n’est pas réputé pour sa facilité à mener, ni pour son confort mais il est fiable et il a tenu. Et Alice, surtout, a tenu. Physiquement. Moralement. Stratégiquement.

L’exploit d’une navigatrice complète

Ce tour des îles britanniques en solitaire et en Mini 6.50, peu l’ont tenté, et encore moins l’ont terminé. Une seule personne, Ben Rogerson, avait réussi à boucler le parcours en 2009 en 15 jours, 3 heures et 8 minutes, mais son temps n’avait pas été homologué par le WSSRC. Alice, quant à elle, a terminé le tour en 14 jours, 19 heures, 56 minutes et 2 secondes — un temps actuellement en cours d’homologation par le WSSRC. Car si le bateau peut sembler petit, l’effort, lui, est immense. Ce qu’Alice Valiergue vient d’accomplir est un exploit de marin complet: gestion de l’effort, lecture fine de la météo, prise de décision permanente et résilience face aux galères techniques.

Et au-delà de la performance sportive, c’est un engagement total, sans assistance, qui force le respect. Dans un monde de plus en plus technologique, son aventure rappelle que le cœur de la course au large reste humain.

Trace route Alice

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